Famille « recomposée » : pourquoi est-ce (parfois) si difficile ?

Selon l’Insee, un enfant sur dix vit (en 2011) dans une famille recomposée, c’est-à-dire une famille où les enfants ne sont pas tous ceux du couple actuel. S’il est des familles où cette recomposition se passe bien, c’est-à-dire où le nouveau couple parvient à trouver un accord satisfaisant sur la façon d’élever ensemble les enfants de chacun et les enfants communs, beaucoup de ces nouveaux couples se trouvent complètement dépassés par les difficultés relationnelles qui surgissent, le plus souvent entre beau-parent et beaux-enfants. Selon Catherine Audibert (Œdipe et Narcisse en famille recomposés, Payot, 2009), « Dans les familles recomposées, la parentalité peut être perturbée par le mythe que seuls les vrais parents peuvent élever correctement leurs enfants, au motif qu’eux seuls savent les aimer, le beau-parent étant prié de se tenir à l’écart de leur éducation même s’ils vivent sous son toit au moins une partie du temps. […] Nous verrons plus loin que s’occuper de l’enfant de l’autre, vivre sous le même toit, se soucier de lui, amènent inévitablement le beau-parent à s’interroger, plus ou moins consciemment, sur sa place, son rôle, sur ce qu’ont été ses modèles parentaux, sur l’image de parent que lui donne son conjoint, et sur celle dont il avait rêvé pour lui-même. […] En effet, la parentalité du beau-parent est souvent empêchée par la résistance ambiante à admettre que, lorsque les parents sont séparés, la bonne marche du foyer recomposé dans lequel sont élevés les enfants réclame la responsabilité de deux adultes en présence. »

Ainsi, c’est donc la place de chacun, enfants, parents et beaux-parents, que vient (re)mettre en question la recomposition. Et cette place ne va pas de soi, elle se donne ou pas, elle se prend ou pas, par chacun des membres de la nouvelle famille, et naturellement de façon plus ou moins consciente, plus ou moins naturelle ou douloureuse. Et on comprend bien qu’en premier lieu, la place donnée au beau-parent par le parent est à la fois la plus complexe et la plus déterminante. On comprend bien que le beau-parent est d’autant plus légitime auprès des enfants que le parent lui donne cette place d’adulte responsable. Et que ces enfants et adolescents, rassurés par la présence de ce couple parental à la barre du nouveau navire, vont pouvoir s’appuyer sur ce couple pour dépasser leurs souffrances « d’enfants du divorce », continuer de se construire et devenir des adultes à leur tour capables de transmettre.

Le conseil conjugal et familial est un moyen d’exprimer les difficultés, de prendre conscience de ces problèmes de place qui se jouent et de donner une chance à la nouvelle famille de jouer son rôle protecteur, structurant pour les uns et les autres.